Tout juste une semaine après la fin du Festival de Cannes, me voilà téléportée dans un autre monde. Après le champagne et les stars de la Croisette, voici Cape Town, « la ville la plus inégalitaire du monde », d’après mon Lonely Planet… J’atterris au petit matin au « Sleep and Go backpacker », en plein centre-ville, où j’ai réservé deux nuits, juste avant de partir de France. Après une nuit sans dormir dans l’avion, un long voyage et deux escales (Abu Dhabi et Johannesburg), je suis complètement crevée et m’effondre sur mon lit…

Réveil brumeux en milieu d’après-midi. Je ne pensais pas avoir dormi si longtemps. Il faut que je me dépêche si je veux avoir le temps d’avoir un premier aperçu de Cape Town à la lumière du jour. Ici le soleil se couche tôt…vers 17h30. En sortant, je discute brièvement avec un Sud-Africain de mon backpacker, qui me propose de m’emmener dans un restau africain le soir même… Cool, les rencontres vont vite ici. Et à peine quelques pas plus tard, sur Long Street, la principale avenue commerçante du Cap, je tombe sur un Argentin sympa avec qui je pars en balade jusqu’au Waterfront. En chemin on sympathise aussi avec un groupe de Suisses… Trop fort, ça fait à peine une heure que je suis sortie et je rencontre déjà plein de gens. Un peu déçue par le Waterfront… C’est en fait une sorte de gigantesque centre commercial à ciel ouvert devant le Port. Aucune plage à l’horizon de ce côté-ci de la ville. Une bière en terrasse et je prends congé de mes nouveaux compagnons à la nuit tombée. Je dois me dépêcher de rallier mon hôtel où j’ai rendez-vous à 19h pour aller dîner.

Aïe aïe aïe… J’aurais dû rentrer plus tôt. Les grands trottoirs de Cape Town se sont vidés avec le coucher du soleil. Seuls traînent dans la rue des mecs louches qui ne me disent rien qui vaille. D’un pas rapide genre « je sais où je vais et faut pas m’emmerder », je me faufile à travers cette ville que je ne connais pas. Je dois retrouver mon chemin sans avoir à sortir mon Lonely Planet qui me grillerait instantanément sur place comme « touriste à dépouiller ». Pourtant je ne suis pas du genre trouillarde d’habitude, et après six mois toute seule en Amérique latine je pensais être « suffisamment aguerrie ». Mais là, pour la première fois de mon voyage, je ne me sens pas du tout en sécurité. Une drôle d’atmosphère qui me laisse croire qu’il suffirait d’un geste d’hésitation de ma part pour qu’un de ces mecs qui zone sur le trottoir me cherche des ennuis.

L’instinct de nécessité aguerrit mon sens de l’orientation, d’habitude très mauvais, et je retrouve finalement sans encombre mon backpacker. Ouf!! La nana de la réception m’accueille avec une question qui me surprend un peu. « Avec qui vous allez manger ce soir? » Mais pourquoi elle me pose cette question? C’est un peu indiscret tout de même. « Euh… je vais dans un restau africain avec un Black de l’hôtel… » Et là, elle prend tout de suite un air soupçonneux: « Mais c’est qui ce mec, vous le connaissez? Il fait quoi ici? » Moi: « Euh… non, je l’ai rencontré tout à l’heure dans l’ascenseur… et j’ai oublié son prénom, je ne sais pas qui c’est… » Elle me répond l’air sévère « Ah mais il ne faut pas sortir comme ça avec un mec que vous ne connaissez pas!! C’est dangereux… » « Euh… Ah bon, vous croyez?? » Je tombe un peu des nues. Je n’ai pas l’habitude de me méfier des gens instinctivement comme ça. Et on va juste manger à un restaurant à 5 minutes d’ici, c’est pas comme si j’allais chez lui non plus… Et là, elle me présente les quatre autres touristes installés dans le canapé de la réception en me conseillant d’aller manger avec eux. En fait, elle organise une sorte de « groupe pour dîner » pour que personne ne se retrouve à devoir sortir tout seul… J’ai droit du coup à une rapide leçon des consignes d’ici: 1/Ne pas sortir seul(e) (ça vaut aussi pour les mecs) après 18h, 2/Ne pas s’arrêter si un Black essaye de vous parler dans la rue, 3/Ne prendre sur soi que le strict minimum, surtout le soir… D’un autre côté, vu la trouille que j’ai eu sur le chemin tout à l’heure, je comprends les raisons de ces mises en garde. Finalement, c’est tous ensemble que nous irons manger, moi, les quatre touristes et Steeve (le Black en question). Une de ses remarques éveille d’ailleurs ma suspicion. Au moment de sortir de l’hôtel, j’ai encore mon sac avec mon gros appareil photo à l’intérieur. Une Allemande du groupe le regarde et me dit: « mais t’as quoi dans ton sac? » Moi:  « mon appareil photo ». Elle « Laisse-le ici, il ne faut pas sortir avec un sac, prends juste un peu d’argent dans ta poche ». Et quand je sors mon appareil pour le laisser au coffre de la réception, mon « ami » Black me dit « mais non, prends ton appareil photo. Y a des danseurs au restau, faudra que tu prennes des photos… » Et là, instantanément, une lumière rouge s’allume quelque-part dans mon cerveau. Mais pourquoi insiste-t-il pour que je prenne mon appareil photo?? Est-ce la paranoïa ambiante qui commence à m’envahir ou est-ce mon instinct qui me met en garde?? A vrai dire, je suis incapable de répondre. Quoiqu’il en soit, avec cette simple remarque, Steeve a complètement perdu ma confiance. Comme la majorité des occupants de mon backpacker, presque tous Sud-Africains et Blacks, Steeve n’est pas un touriste. Habitant à Pretoria, il est là pour travailler.

Bon, je vous rassure, la soirée au restau s’est très bien passée. Ce Steeve est peut-être un brave type et mes soupçons uniquement le fruit d’une paranoïa déplacée envers quelqu’un de couleur noire… Ca me fait bizarre d’écrire ça, et ça ne me plaît même pas du tout. Mais il ne faut pas se voiler la face. Tous les mecs louches dans la rue sont des Blacks. Le problème racial, on se le prend en plein dans la figure quand on arrive en Afrique du Sud, un pays où 90% de la population n’a le droit de vote que depuis… 1994. Au restau, Jude, Philippin, arrivé hier, nous raconte qu’il s’est fait menacer dès sa première soirée avec un couteau sur Long Street, à deux pas de l’hôtel. Un Allemand qui est là depuis deux semaines s’est lui fait voler son i-phone alors qu’il retirait de l’argent à un distributeur… Cool… Bienvenue à Cape Town…

19 commentaires pour “Afrique du Sud: premiers pas dans la paranoïa de Cape Town”

  1. Bon l’erreur du retour tardif a été bien rattrapée ensuite par l’attitude déterminée et pas touriste gogo (t inquiètes ils arrivent tous avec leurs Iphone, ça te permettra de souffler ! ) !
    Pour les AJ elles sont tenues par des blancs qui ont été élevés dans cette paranoïa donc il ne faut pas leur en vouloir d’avoir de tels conseils extrêmes …après il est clair que tte sortie après le coucher du soleil doit se faire a plusieurs …et que tes poches, moins elles sont remplies moins elles se feront allégées !!!quant a l’appareil photo …c bo aussi les souvenirs en tête ! 😉


  2. Hey hey épique cette arrivée en Afrique du Sud !
    Bon séjour en tous cas et bonne chasse aux billets pour la coupe du monde 😉

    Rabby.


  3. Patricia

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    J’ai lu ce post avec beaucoup d’attention Sarah…Effectivement tu n’auras pas la même liberté de circuler que tu as vécue jusque là sur d’autres parties du monde. C’était pareil au Congo pour moi, toujours accompagnée et la nuit tombant vite, il faut bien s’organiser pour être rentrée « à temps », car parfois de drôles d’énergumènes peuvent effectivement faire leur loi…!!!Profite bien de tes sorties en groupe et reste discrète quand tu feras tes clichés 😉 Mes amicales pensées!! Pat


  4. stéphane

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    Bonjour,

    bravo pour ce superbe tour du monde, ex globe trotter, je sais que c’est un expérience fantastique.

    Bienvenu également en Afrique du Sud. Dommage que vous insistiez autant sur l’insécurité, cela ne reflete pas du tout la vie au Cap. Et je sais de quoi je parle pour y avoir été plusieurs fois et avoir vécu plus de deux ans.

    J’espère des posts plus positifs car l’Af du sud est un pays extraordinaire avec des gens merveilleux.

    Enfin, êtes vous satisfaite de liaison via Abou Dhabi ?

    Good luck

    Stéphane
    http://chroniquesudaf.blogs-de-voyage.fr/


    • Sarah

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      bonjour, ce post est seulement le premier que j’ai ecrit en arivant en afrique du sud, et refletait alors vraiment mon impression a l’arrivee. qui n’est pas que la mienne d’ailleurs, mais celle de la plupart des touristes que j’ai rencontre ici. mise a part ceux qui ont suffisament les moyens de se payer tout le temps le taxi ou de louer une voiture, et qui ne se retrouvent donc pas a marcher tout seuls dans le noir en pleine rue. de tous mes voyages, c’est vraiment la premiere fois que j’ai la boule au ventre quand je devais faire les 200 m qui separaient mon hotel sur longstreet du cyber cafe. maintenant, ca va mieux, j’ai change de quartier. je loge chez une sud-africaine et l’insecurite je la ressens beaucoup moins. je ne sors jamais toute seule. on fait tous nos deplacements en voiture. d’ailleurs, pour venir au cybercafe ou je suis en train d’ecrire, on a pris la voiture pour faire 300m… mais sinon, je confirme que le cap est une ville magnifique et les sud-africains tres accueillants… j’aurai l’occasion d’en parler dans mes post suivants…


  5. stéphane

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    Merci Sarah pour votre réponse. Tout cela me surprend beaucoup et m’inquiète… Il est clair qu’une fille ne doit jamais se promener seule la nuit. Il y a, bien sur, un ensemble de comportements nouveaux à intégrer quand on arrive d’ailleurs. Mais qui relève du bon sens comme partout. Ils rentrent vite dans les moeurs au quotidien quand on y habite…

    Bonne continuation et, au fait, essayez vous d’avoir un billet pour le match france/uruguay conformément à votre fil conducteur ?


    • Sarah

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      oui, j’ai prevu de chercher mon billet gratuit en echange d’un sourire pour france uruguay… il faut d’ailleurs que je prepare mes pancartes… je vais essayer de le faire dans les trois langues, francais, espagnol, anglais… et pourquoi pas afrikan…


  6. Chris

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    Quel d’avoir cette vision de cape town ! J’y habite depuis 1 ans, et toujours aucun probleme. Faites preuve de bon sens, et ne cedez pas à la paranoia.
    J’espere que vous pourrez tout de même profitez des charmes de cette ville que j’aime tant.


  7. Nelly

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    Hello You 🙂 Cela fait un bout de temps que je ne t’avais pas rendue une petite visite virtuelle … Je vois que tu as remis Cannes cette année ! Enjoy l’Afrique du Sud … J’avoue qu’ici nous ne suivons rien de la Coupe du Monde mais BRAVO pour tes premiers billets gratos ! Sacré Sarah !
    Gros gros bisous ! Take care…


  8. evertkhorus

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    Je vois que les débuts ont été difficile, mais ça a l’air d’être mieux là où tu es maintenant. Bonne continuation en Afrique du Sud. Je ne sais pas si tu lis beaucoup, mais si ça t’intéresses, le 24 août, on sera tout un tas sur la blogosphère littéraire à parler de livres d’auteurs sud-africains.


  9. Tristana

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    Comme tu l’as dit dans un précédent commentaire, il ne faut pas qu’un pays te démotive, même si faut dire que l’accueil refroidit pas mal (j’avais déjà entendu parler de cette même impression par d’autres voyageurs), j’crois qu’il doit bien y avoir plein d’autres pays pour te redonner chaud au coeur !


    • Sarah

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      t’inquietes, je continue ma route. j’ai fait une petite escale à paris et je repars avec une amie direction pékin par voie terrestre. plein de nouvelles aventures en perspective… en duo pour trois mois!!



  10. Eh bien eh bien… J’ai entendu parler de l’insécurité en Afrique du Sud. C’est sûr qu’il vaut mieux s’informer avant de partir en voyage. Prendre des précautions, oui bien sûr on n’est pas totalement à l’abri des ennuis. Nos grand-mères diraient : « prudence est mère de sureté ». Quoi qu’il en soit, l’Afrique du Sud mérite quand même d’être visitée ! Lorsqu’on a pu voir Kruger et ses « big five », les « Victoria fall »… on oublie assez vite nos préjugés et on se laisse charmer par le pays.


    • Sarah

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      oui bien sûr, l’afrique du sud mérite d’être visité! c’est un pays magnifique, malgré l’insécurité qui règne dans les villes. je voudrais bien y retourner, mais je n’irai pas seule avec mon sac à dos cette fois-ci… ce sera avec des amis ou une agence de voyage… ou alors en louant une voiture pour ne pas être dépendant des transports en communs qui ne sont pas très sûrs…


  11. Onjasoa

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    Bonjour Sarah je trouve que vous exagerez trop la situation partout dans le monde y a toujours le bon et le mauvais , black ou white.


  12. Comme toutes grande villes dans le monde il faut rester méfiant.
    Mais au cap, le soir pour trouver un restaurant nous avons eu pas mal de sollicitations.
    Pendant plus de 15 minutes deux personnes louches tourner autour de nous… Mais la police est en nombre dans la ville il suffit de s’en rapprocher pour être tranquille



  13. veronique chevreuil

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    Bonjour je suis a Cape Town depuis quelques semaines.. je n’ai pas envi de sortir seule qui veut m’accompagner ou me proposer un endroit ou des activites de groupe..merci d’avance


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